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(fr) Socialisme Libertaire - Anarchistes et urnes: Trahison ou simple soumission?
Date
Sat, 19 Jul 2025 21:12:39 +0100
Introduction par le site Le Père Peinard ---- " Voter, c'est renforcer
l'État qu'on prétend combattre. Un texte incendiaire (du site joie et
tension) démonte l'illusion démocratique et fustige ceux qui ont troqué
la lutte pour un bulletin. ---- Dans leur texte «Le Citoyennisme qui
vient», les auteur·e·s ne prennent pas de pincettes: voter, même par
stratégie, c'est se plier à l'État, intégrer sa machine oppressive, et
devenir complice de ses violences. Ils dénoncent une partie des
anarchistes qui, en glissant leur bulletin dans l'urne l'été dernier,
ont abandonné toute perspective révolutionnaire. ---- Le texte rappelle
avec virulence que l'électorat n'est qu'une extension de l'État, et que
toute participation au vote valide les répressions, les matraques, et
les oppressions à venir. Ils fustigent aussi l'illusion d'un moindre
mal: pour eux, gauche, droite ou extrême-droite, tous participent à la
domination capitaliste et étatique.
Un rappel mordant que la révolution ne se gagne pas dans les isoloirs
mais dans la rupture totale avec l'ordre établi. À lire pour quiconque
hésiterait encore entre lutte radicale et compromission électorale. "
* * *
Après le naufrage:
à propos de l'anarcho-électorat de l'été 2024
«Puisque dans le contexte de fièvre électoraliste actuelle, un certain
nombre de camarades anarchistes, révolutionnaires, autonomes, etc. sont
frappé.e.s de désorientation politique et stratégique, il nous a semblé
qu'une clarification s'imposait.
Nous avons écrit ce texte en l'honneur de tous.te.s nos camarades qui se
sont pressé.e.s dans les isoloirs en juin et en juillet dernier pour
déposer leur bulletin dans les urnes, en y glissant au passage leur
dernière parcelle de dignité et en abandonnant toute velléité
révolutionnaire.
Nous sommes heureux.ses de constater qu'iels ont aujourd'hui le
gouvernement qu'iels méritent, et un ministre de l'Intérieur dont iels
peuvent être fier.e.s.
Parce qu'iels ont contribué par leur vote à justifier ce gouvernement,
et surtout à justifier l'Etat et l'exploitation, nous souhaitions leur
rendre hommage avec ce second texte. Mieux, puisque Le citoyennisme qui
vient, à notre grande surprise, a semblé choquer certain.e.s anarchistes
autoproclamé.e.s - alors même que ce texte ne faisait que rappeler
succinctement les fondamentaux de l'anti-électoralisme et de
l'anti-étatisme - nous avons décidé d'en développer ici le contenu. En
d'autres termes, c'est une façon de dire qu'on persiste et signe.
Cela ne devrait même pas être nécessaire. Et pourtant... Pourtant
certain.e.s camarades se sont offusqué.e.s. Pourtant, Paris Luttes
Infos, principal site mutu parisien nous a censuré.e.s - en même temps
que plusieurs autres textes du même type - sans même amorcer la moindre
discussion, avec des arguments si absurdes qu'ils auraient tout aussi
bien pu servir à censurer Reclus, Libertad, Malatesta et bien d'autres
(*), parachevant ainsi un virage électoraliste et social-démocrate qui
restera comme un tournant majeur dans l'histoire de ce site. Si l'on
ajoute à cela la publication d'un texte d'une candeur et d'une tiédeur à
faire passer Hollande et Glucksmann pour l'avant-garde d'une faction
armée révolutionnaire (N'y a-t-il rien à célébrer?), l'on ne peut que
constater l'ampleur du naufrage.
Voici donc, en quatre points principaux, ce que nous pensons de
l'égarement de nos ex-camarades qui se sont perdu.e.s dans les urnes, de
la logique d'assimilation libérale à laquelle iels se sont plié.e.s, de
la fonction réactionnaire du corps électoral qu'iels ont intégré et de
l'inutilité de distinguer entre les différentes formes d'Etat, que nous
combattons toutes.
Le sens de la rupture
Nous estimons que le principal facteur de désorientation de nos
camarades l'été dernier a été la perte du sens de la rupture. Par-là
nous entendons qu'iels n'ont pas été capables de faire la différence
entre les clivages de surface qui agitent l'espace public
libéral-capitaliste et le véritable antagonisme sur lequel nous devons
porter toute notre attention et toute notre énergie destructrice.
Qu'on ne s'y trompe pas: c'est une question cruciale, à laquelle il peut
s'avérer difficile de répondre dans certains contextes. Identifier son
véritable ennemi et le distinguer des faux-amis qui pullulent à gauche
n'est pas toujours facile. Mais tout de même: il ne fallait pas une
conscience politique si aiguisée en juin/juillet dernier pour percevoir
que le pseudo-clivage commenté avec une grande intensité dramatique par
les médias relevait ni plus ni moins de ce que Debord appelait «les
fausses luttes spectaculaires des formes rivales du pouvoir séparé»,
autrement dit une parodie de division, la simple expression de la
compétition des élites et de leurs partis pour leurs intérêts sectoriels
spécifiques, donc pour la gestion autoritaire de l'État
libéral-capitaliste. À aucun moment, sous aucune forme que ce soit, un
véritable antagonisme, expression d'une rupture radicale, n'a été en jeu.
Rien de pire que ces fausses divisions entre élites. Elles sont une
distraction, la mise en scène d'un conflit qui n'existe que sur fond
d'un consensus bien plus profond et solide, à savoir l'adhésion au
système libéral- capitaliste et la validation de la domination étatique.
En d'autres termes ces luttes politiques de surface, ces querelles
mineures entre exploiteurs, ce soi-disant clivage gauche-droite n'est
qu'une petite dispute entre amis à propos de laquelle les
électeur.rices, crédules, sont invités à arbitrer.
Le libéralisme - en tant qu'organisation politique - trouve ici son
apogée. C'est un formidable instrument de dépolitisation qui neutralise
la conflictualité, anesthésie les individus et réduit la politique à une
querelle entre gens de bonne compagnie dont la compétition et
l'alternance sont un leurre puisqu'en arrière-plan l'essentiel reste
hors de portée de la contestation: le système, ses fondements, ses
valeurs, ses institutions, ne sont pas mis en cause et sont voués à
demeurer intacts.
Quelle preuve faut-il à nos camarades? La gauche réclamait la
victoire... C'est-à-dire, comme on le sait à présent, la possibilité de
mettre au pouvoir une énarque ou un ancien ministre de l'Intérieur ayant
soutenu la répression à outrance qui a mené à la mort de Rémi Fraisse.
C'est cela, une victoire? Non, tout le spectre de l'échiquier partisan
officiel, qui prend place dans les assemblées et dans les lieux du
pouvoir, de l'extrême-gauche à l'extrême-droite (oui, on a bien dit tout
le monde), n'incarne qu'un seul et même camp: celui de l'oppression
politique et économique. Faut-il rappeler le bilan de la gauche au
pouvoir? Quel degré d'amnésie historique faut-il avoir pour croire que
les choses iront «mieux», que nous pourrons «souffler», que le
militantisme sera plus «facile» ou que notre vie sera meilleure parce
que ces gens-là auront gagné?
On nous a dit qu'il fallait éviter le pire. Mais le pire n'était pas en
jeu à l'occasion des dernières élections législatives, le pire est déjà
au pouvoir depuis longtemps. À vrai dire, il n'y avait aucun enjeu dans
ces élections. C'était, nous l'avons dit, un non-évènement, une série de
péripéties toutes entières contenues à l'intérieur du monde marchand.
Le véritable antagonisme est ailleurs. Et les représentants de la
pseudo-gauche parlementaire n'en sont pas plus proches, et ne nous en
rapprochent pas plus, que la droite ou l'extrême-droite. Pour rompre
véritablement avec l'Etat libéral-capitaliste, il faudra les combattre
tous, sans distinction, comme un seul et même ennemi. Cessons de
considérer un camp comme plus proche de nous, de nos idées, et l'autre
comme plus hostile. Nous ne devons instaurer qu'un seul et unique
rapport d'hostilité total, absolu, envers l'ensemble des élites
gouvernantes, quelle qu'elles soient. Notre conflictualité doit être
aveugle au système de différentiation qui manifeste la querelle des
oppresseurs et leurs désaccords superficiels sur les modalités de
gestion de l'oppression socio-économique. Nous devons procéder à la
simplification radicale des choses, à l'émergence d'une fracture unique
de part et d'autre de laquelle il n'y a aura pas de réconciliation
possible.
Voilà le seul vrai antagonisme, que nous ne devons jamais perdre de vue:
la rupture avec la totalité de l'ordre existant, sans nuances, sans
négociation possible avec celles et ceux qui participent au spectacle
que l'on nous vend comme une marchandise. Ne nous laissons pas
distraire, mettons en oeuvre les conditions d'une séparation
intransigeante, celle qui nous maintient à distance de tout ce qu'il
faudra détruire: le libéralisme, le capitalisme, donc aussi l'Etat -
plus ancien encore que ces masques-là, qu'il a pris comme il en a pris
d'autres au cours des siècles.
Cet antagonisme, par lequel le système est confronté à sa pleine et
entière négation, a plusieurs noms et nous les acceptons tous. C'est la
lutte des classes, à condition que l'on admette que le prolétariat ne
soit plus seulement ouvrier mais englobe toutes les catégories
opprimé.e.s, exploité.e.s et dominé.e.s. C'est la guerre sociale enfin
déployée dans tous les secteurs de la société. C'est le combat du peuple
contre ses ennemis. C'est, si vous y tenez, la contradiction principale,
vers laquelle convergent nécessairement toutes les luttes. Peu importe
le vocabulaire: ce qui compte est le partage clair, limpide, entre les
partisans du système - tous les oppresseurs, de l'extrême-gauche à
l'extrême-droite citoyennistes et électoralistes - et les forces
insurrectionnelles qui aspirent à les renverser en même temps que l'Etat.
Aucune «victoire» ne passe par l'intérieur du système. Nous autres,
insurrectionalistes, ne gagnerons jamais grâce à une élection et nous ne
nous laisserons jamais distraire par le spectacle navrant de la
concurrence entre les marchandises électorales, ce marché illusoire où
les consommateurs paient en bulletins de vote leur soumission au pouvoir
et leur confort moral.
Contre les droits libéraux
Mais enfin, nous dira-t-on, n'y avait-il tout de même pas, lors des
dernières élections, en fonction du vainqueur, un enjeu en termes de
progression ou de régression des droits? N'est-t-on pas en pleine
période de backlash illibéral un peu partout dans le monde, et
n'était-ce pas dès lors égoïste de dénoncer l'élection et les
électeur.rices alors que l'on pressentait que des minorités seraient
impactées?
Ce chantage aux droits libéraux mérite qu'on s'y attarde un peu, tant il
est crucial dans la façon dont certain.e.s camarades ont perdu de vue le
véritable antagonisme et sont laissé.e.s happer par une logique
d'assimilation au système libéral-capitaliste.
Voter, donc, serait indispensable pour protéger les droits existants des
minorités, ou pour empêcher qu'elles ne les perdent. Mais alors nous ne
comprenons plus: ces droits seraient-ils un substitut à la lutte
révolutionnaire? Ou sinon, peut-être, une manière indirecte de mener
progressivement à la rupture avec le régime? Ils permettraient ainsi aux
dominé.e.s de gagner la lutte contre ce qui les opprime... Non. Un tel
monde n'existe pas. Les droits sont une machine à neutraliser les
antagonismes et cette machine fonctionne par le triple mécanisme de
l'assimilation, de la dépolitisation et de la marchandisation:
Assimilation, car les droits que l'Etat libéral-capitaliste octroie aux
opprimé.e.s ne visent qu'à les intégrer à l'ordre bourgeois et à les
pousser à s'adapter au mode de vie docile et conservateur, calqué sur le
modèle familial patriarcal, qui est le moteur de la reconduction et de
la perpétuation de l'ordre existant. Les droits sont le vecteur du
confort, du conformisme et de la soumission.
Dépolitisation, car en échange de ces droits les opprimé.e.s subissent
une injonction à se taire, à cesser toute critique du système et à ne se
mobiliser que dans le strict cadre des formes normées de la
participation routinisée (vote, pétitions ineptes, engagement syndical
ou associatif et dans le meilleur des cas manifestations
ritualisées...). Faut-il rappeler que toute attaque contre le régime,
donc tout positionnement en tant qu'ennemi réel de celui-ci, de part et
d'autre de la véritable rupture antagoniste, produit immédiatement la
remise en cause des droits et l'application d'une logique d'exception
qui désigne toute forme d'extériorité comme une proclamation terroriste?
Marchandisation, enfin, car l'acquisition des droits permet de profiter
des largesses consuméristes du système, d'accéder au marché, de jouir de
ses biens et - faveur ultime - de voir sa propre culture et son mode de
vie éventuellement eux-mêmes érigés en marchandises. C'est la récompense
ultime: devenir soi-même un produit, une petite parcelle du spectacle -
intégrer un monde qu'on ne veut évidemment plus détruire.
Tout cela est connu. Droit au mariage, droit à s'engager dans l'armée...
Les queers insurrectionnalistes de Bash Back! nous ont mis en garde il y
a plus de dix ans déjà contre les pièges de l'assimilationnisme libéral:
pour les minorités racisées, féministes, LGBT, queers, comme pour le
prolétariat ouvrier avant elles, la lutte pour les droits est un
traquenard et une supercherie. C'est l'espoir de gagner quelques
privilèges, d'embourgeoiser son existence, ce qui conduit à la
normalisation sociale et à l'abandon de toute perspective
révolutionnaire. Pire, quémander à l'État un peu plus d'égalité, c'est
le conforter et le renforcer, c'est participer à l'extension du spectre
de son contrôle juridique sur les populations, c'est s'inclure dans
l'ordre légal et se laisser recouvrir de la puissance légiférante du
système. Croyez-vous que vous arrachez vos droits à l'Etat? Il vous les
octroie de bonne grâce tant que vous vous soumettez.
Au sommet, le roi des droits: le droit de vote, évidemment. Peu importe
combien de générations d'anarchistes - et surtout combien de générations
d'anarcha-féministes - ont combattu ce droit comme une illusion, un
leurre déployé par l'Etat libéral pour détourner les vocations
révolutionnaires de leur but. Peu importe Emma Goldman et tant d'autres!
Oublions-les, marchons sur leurs cadavres. Nos camarades, si pressé.e.s
d'enterrer en juin/juillet dernier leurs propres idéaux, ont renié en un
geste, dans l'isoloir, tout un passé de lutte.
Nous disons pour notre part que les droits libéraux ne peuvent être ni
réclamés, ni invoqués. Et cela implique aussi, d'ailleurs, de résister à
la tentation d'en appeler à la justice étatique, à ses juges et à ses
prisons. Car y céder c'est encore renforcer l'Etat, le soutenir et
l'approuver, c'est contribuer activement et volontairement à consolider
l'origine même de l'oppression raciste, sexiste, homophobe ou
transphobe. Lutter contre l'oppression passe par la destruction du droit
et la démolition des institutions qui le fondent.
Si l'on regarde un peu en arrière, on voit à quel point cette question
est historiquement décisive. Chaque lutte, chaque époque du prolétariat
sous ses différentes incarnations (des ouvriers du XIXème siècle
jusqu'aux minorités racisées ou aux minorités de genre actuelles) s'est
vu offrir, après avoir constitué pendant un temps une menace subversive,
une place au chaud dans le système libéral-capitaliste. Et à chaque
génération certain.e.s ont cédé à l'Etat, jusqu'à en devenir parfois des
piliers à force d'embourgeoisement et de soumission. À chaque fois,
mettre un bulletin dans une urne, et croire qu'un camp au sein de
l'élite, parce qu'il promet un peu plus de droits, ou leur préservation,
peut contribuer à diminuer l'oppression, ont été l'expression la plus
manifeste de ce renoncement réactionnaire.
Le vote comme collaborationnisme d'Etat
Voter n'est pas un acte anodin, ni une petite compromission. L'électeur
accomplit un double geste d'intégration à l'État et de renforcement de
celui-ci. C'est un acte de collaboration volontaire et la moindre des
choses serait qu'il l'assume.
Voter c'est s'intégrer à l'Etat
Qu'est-ce que le «corps électoral», si ce n'est une institution étatique
pleinement reconnue et identifiée (on est sur une liste, on a sa carte,
on se déplace le jour prévu, dans le bureau de vote officiel...) de
désignation de la portion des élites appelées à gouverner à un moment
donné?
Tâchons d'éclaircir cela en nous délestant des illusions propres à la
fiction démocratique. L'électorat n'est pas une entité extérieure à
l'État, qui serait autonome vis-à-vis de lui et qui dans lequel on
pourrait déceler une quelconque trace de souveraineté. Vous pensiez à la
souveraineté populaire? Mais quel.le anarchiste, quel.le révolutionnaire
croit encore à cette fable? Rien de tel n'existe dans les limites de
l'État libéral-capitaliste. Celui-ci est tout entier bâti sur la
neutralisation et l'exclusion de toute forme de mobilisation collective,
populaire et égalitaire par laquelle des individus pourraient abolir la
domination et décider, par un acte d'auto-détermination, de leurs
conditions d'existence. Qu'on appelle cela «peuple» et «souveraineté
populaire» n'a d'ailleurs aucune importance. L'important est que vous ne
les trouverez nulle part à l'intérieur de l'ordre existant. Ni dans la
rue, ni dans les isoloirs. Et pour cause: ce n'est que dans
l'antagonisme véritable, dans l'action de négation et d'abolition totale
du système que quelque chose ressemblant à une telle souveraineté
survient. C'est seulement dans la lutte et la rupture, dans les
interstices insurrectionnels et dans les gestes destructeurs, que l'on
peut discerner l'expression d'une volonté libre et autonome.
Mais si nulle volonté ne s'exprime donc dans l'isoloir, que reste-t-il
alors à l'électorat? Une simple fonction d'État, un rôle
institutionnalisé parfaitement normé et intégré, qui entretient une
relation d'interdépendance avec la fonction élective dont il est le
moteur: électeur.rices et élu.e.s sont les deux faces d'une même pièce,
les deux composantes d'un ensemble homogène et indissociable qui
constitue le système de cogestion gouvernementale. Oui, l'électeur.rice,
même lorsqu'iel se prétend anarchiste, est cogestionnaire de la
domination. Une réalité que certains juristes bourgeois de la Troisième
république avaient crument décrite avant que le gaullisme ne recouvre
tout cela de l'illusion démocratique bonapartiste.
Voter c'est renforcer l'Etat
Pire, non content de participer à sa propre domination, l'électeur.rice
légitime par son vote l'existence même de l'État et la mise en ordre de
l'espace social. Car l'élection est un rituel de maintenance du système
qui vise exclusivement à en reproduire les mécanismes à l'infini au sein
de la temporalité libérale fondée sur le rythme cyclique du calendrier
électoral.
Qu'on soit bien clair sur ce que cela signifie: chaque électeur.rice
valide l'ensemble du système et doit assumer l'entière responsabilité de
la politique du vainqueur, qu'iel légitime et qu'iel soutient du fait
même du bulletin qu'iel a mis dans l'urne. Que ce soutien soit direct
(si son candidat qui a gagné) ou indirect (en cas de défaite, si la
marchandise politique qu'iel a consommée n'a pas pris la place d'une
autre) n'a pas la moindre importance. L'acte de vote, dans sa dimension
collective, dans l'autosatisfaction générale qu'il déploie, en tant que
phénomène par lequel la société contemple et célèbre sa propre docilité,
est toujours une manière d'acquiescer à l'ordre existant. Voilà pourquoi
tout.es les électeur.rices de juin/juillet ont validé par avance tous
les gouvernements à venir, quelle que soit leur composition. Voilà
pourquoi iels ont approuvé par avance tous les ministres de l'Intérieur
à venir. Et c'est bien de toi, camarade, que l'on parle ici: toi qui a
voté, tu es responsable des répressions futures, des charges de CRS, des
LBD et des matraques, tu soutiens les GAV et les CRA, tu soutiens les
flics et tu les soutiendras encore quand ils tireront à vue. Tout cela
est ton oeuvre, tu as participé. Et si jamais l'Etat tue encore l'un.e
de nous, tu devras assumer ta part de responsabilité. En votant,
«camarade», tu as choisi ton camp.
Le plus étonnant est que cela puisse faire débat dans nos rangs. En
écrivant Le Citoyennisme qui vient, nous avions l'impression de ne faire
que répéter des arguments anciens: Elisée Reclus, Octave Mirbeau, Albert
Libertad - dont les anarchistes ressortent la formidable attaque
anti-électoraliste à chaque séquence électorale - et bien d'autres ont
déjà dit tout cela, chacun à sa manière. Et aucun d'entre eux ne s'est
contenté de critiquer les élections en épargnant ou en excusant celles
et ceux qui y participent, en les considérant simplement comme de
bon.nes camarades un peu égaré.e.s. Non: ils les ont insulté.e.s et
méprisé.e.s, et ils ont eu raison de le faire. Ils leur ont réservé le
même traitement qu'à leurs ennemi.e.s.
Un exemple? Toi qui as voté en juin/juillet 2024, voici ce que te dit
Libertad:
«Tu es un danger pour nous, hommes libres, pour nous, anarchistes. Tu es
un danger à l'égal des tyrans, des maîtres que tu te donnes, que tu
nommes, que tu soutiens, que tu nourris, que tu protèges de tes
baïonnettes, que tu défends de ta force de brute, que tu exaltes de ton
ignorance, que tu légalises par tes bulletins de vote, - et que tu nous
imposes par ton imbécillité.»
(Albert Libertad, Le criminel, c'est l'électeur!, 1906)
Notre radicalité a-t-elle tant régressé plus d'un siècle plus tard pour
que ces mots froissent la sensibilité d'anarcho-électeur.rices en
perdition? Tant pis. Nous préfèrerons toujours Libertad à votre
extrême-gauche parlementariste, à vos insoumis homophobes et
transphobes, à vos socialistes islamophobes, tous ces oppresseurs que
vous avez contribué à désigner en pleine fièvre électoraliste, lorsque
vous avez cru que voter était un geste antifasciste grandiose.
L'anti-électoralisme n'a rien d'une posture folklorique ou désuète. Dans
un climat militant où les fondements de l'anarchisme et de
l'insurrectionnalisme se sont manifestement dilués dans le citoyennisme
libéral ambiant, où des pseudo-révolutionnaires misent sur leurs petites
parts de marché parlementaire, il nous apparait crucial de marteler
cette évidence: tout électeur est un collabo.
Contre l'État, quel qu'il soit
Notre indifférence envers la séquence électorale de l'été 2024 ne vient
pas seulement de la nocivité d'un vote destiné à départager la gauche et
la droite du Capital. Elle vient aussi du fait qu'à nos yeux, tous les
Etats se valent et qu'aucun, quel que soit le régime ou le programme des
gouvernants, n'est meilleur qu'un autre : quel que soit le contexte,
quelle que soit la période, l'État est toujours une instance
d'exploitation et d'oppression. Nous autres, insurrectionnalistes,
combattons tous les Etats et nous moquons des différences subtiles et
scolastiques que les intellectuels organiques de la bourgeoisie aiment à
établir entre les différents types de régimes.
A notre grand étonnement, Ce fut l'argument le plus controversé du
Citoyennisme qui vient. Dans la fièvre électoraliste de l'été dernier,
tandis que la gauche jouait sur la peur du fascisme pour accroitre sa
clientèle électorale, cet argument a heurté des camarades.
Soyons pédagogues, rafraichissons-leur la mémoire, d'abord avec Malatesta:
«Les fascistes battent, incendient, tuent, violent toutes les libertés,
piétinent la dignité des travailleurs de la manière la plus scandaleuse
qui soit. Mais tout le mal que le fascisme a fait ces deux dernières
années (...) est-il comparable au mal que l'État a fait tranquillement
(....) pendant d'innombrables années, qu'il fait encore et qu'il fera
aussi longtemps qu'il existera? Même en laissant de côté le fait
essentiel que l'État est le défenseur des privilèges et donc la cause du
maintien du prolétariat dans les conditions de misère et d'abjection où
il se trouve, et en ne parlant que des violences les plus voyantes, des
violations de la liberté, des atteintes à la dignité, des souffrances
physiques et morales infligées, des meurtres commis par l'État et par le
fascisme, son enfant illégitime, lequel des deux est le plus coupable?
(...) Il me semble ridicule de demander à l'État de supprimer le
fascisme, alors qu'il est bien connu que le fascisme est une création de
la bourgeoisie et du gouvernement (...) et qu'il ne sera pas supprimé
volontairement par le gouvernement tant qu'il ne se sentira pas assez
fort pour s'en passer... en attendant de le ressusciter à nouveau
lorsque le besoin s'en fera sentir».
(Errico Malatesta, «Il fascismo e la legalità», Umanità Nova, 14 mars 1922)
Puis avec Erich Mühsam, qui écrivit ce qui suit alors même qu'il
subissait la persécution nazie:
«Ce qui fait de l'État un État et ce qui rend tous les États identiques
[est] le remplacement du lien immédiat entre les personnes par le
transfert du pouvoir à certaines d'entre elles afin qu'elles puissent
régner sur les autres. L'absence de pouvoir dans l'organisation sociale
est le critère crucial de l'anarchie, ou, pour exprimer cette
explication négative sous une forme positive: l'anarchisme ne lutte pas
pour un certain type de pouvoir - il lutte pour l'autodétermination et
l'autogestion humaines. Par «pouvoir», nous entendons toute prétention
autoritaire à créer une division entre ceux qui gouvernent et ceux qui
sont gouvernés. La forme exacte du gouvernement n'a pas d'importance. La
monarchie, la démocratie et la dictature ne sont que des formes
différentes d'oppression centralisée des personnes. Elles établissent
toutes des États.»
(Erich Mühsam, La société libérée de l'Etat: qu'est-ce que l'anarchisme
communiste?, 1933)
Voilà. L'Etat est l'ennemi principal, nous sommes d'accord avec
Malatesta. La forme exacte de l'Etat (monarchie, démocratie, dictature,
etc.) n'a pas d'importance, nous sommes d'accord avec Mühsam. Et si l'on
s'accorde sur le fait que ces deux anarchistes savaient de quoi ils
parlaient - sans doute un peu plus que les ex-camarades de Paris Luttes
Infos qui nous ont censuré -, nous pouvons partir sur de bonnes bases
pour mieux saisir les enjeux des élections législatives de juin/juillet
2024.
Tout Etat nait et se perpétue par la violence
Nous autres, insurrectionnalistes, aimons bien avoir une perspective
historique plus large que la simple analyse du système
libéral-capitaliste tel qu'il s'est mis en place à partir de la fin du
XVIIIème siècle en Europe. Attention, cela ne veut pas dire que nous
nous trompons d'ennemi: c'est bien ce système dont nous voulons
aujourd'hui la destruction. Mais nous savons aussi que l'État et sa
violence sont plus anciens. Nous savons tout ce que doit le capitalisme
à l'oppression coloniale et à l'extermination massive des peuples
colonisés au cours des siècles antérieurs, notamment en Amérique Latine.
Et nous avons appris des anthropologues et des historien.ne.s combien la
genèse de l'État, ses massacres, ses guerres, son esclavagisme et son
impérialisme, est lointaine. Cela fait plusieurs millénaires que la
catastrophe étatique a commencé, et avec elle - puisque c'est ce qui l'a
constituée et l'a justifiée - la domination socio-économique, la
distinction de genre et les hiérarchies racistes. Depuis lors, les
régimes, les valeurs et les idées qui soutiennent l'État ne sont que les
expressions secondaires et superficielles de sa violence première et de
son but unique de maintien de la domination. Peu importe que vous ayez
un empereur, un roi, un dictateur, voire un président ou un parlement
élus, peu importe le nom qu'on donne à leurs esclaves, sujets ou
citoyens: à travers les millénaires, les empires, les monarchies, les
dictatures, les soi-disant «démocraties» ou les républiques n'ont été
que les prête-noms de l'oppression fondamentale qui se tenait
continuellement en arrière-plan, celle de l'État.
L'entrelacement politico-économique qu'est le système
libéral-capitaliste est à la fois l'incarnation la plus récente de
l'étatisme - son nouveau nom après tant d'autres dans l'histoire - et
son apogée, sa formule la plus sophistiquée et la plus aboutie: la
marchandisation du monde - la réduction de toute chose et de toute vie à
sa valeur d'échange - et la dépolitisation libérale de la société sont
la forme la plus terrible de l'impuissance humaine et de la séparation
entre maîtres et esclaves.
Cette marchandisation et cette dépolitisation se caractérisent par la
violence fondatrice qui se dissimule au coeur des marchandises
fétichisées et de la tiède liberté octroyée aux citoyens. Derrière le
marché, et derrière l'espace public libéral, derrière les biens de
consommation, derrière les droits et les petits privilèges accordés à
des consommateurs heureux, il y a une victoire. Celle de nos ennemis,
remportée à grands coups de répression, d'assassinats, d'enferment et de
surveillance généralisée. Dès leur naissance, le capitalisme (par le
biais de l'accumulation primitive) et le libéralisme (par la coercition
brutale exercée contre les forces contestataires) se sont appuyés sur
une violence extrême pour exister. Que celle-ci ait disparu de l'horizon
immédiat d'une partie des citoyens ensevelis sous les marchandises et
les droits signifie uniquement que cette violence a quitté le centre des
sociétés contemporaines pour être reléguée à leur périphérie.
Ce mouvement de la violence du centre à la périphérie concerne tous les
Etats. Tous, même les pires, ménagent des espaces où il fait bon vivre
et les protègent par la terreur et le meurtre. Même dans l'Italie
fasciste, dans l'Espagne de Franco, dans le Chili de Pinochet, en
Argentine à l'époque du terrorisme d'Etat et des commandos de la mort,
il y avait toujours une frange de la population qui vivait bien,
confortablement, qui ne voyait rien, qui jouissait de l'ordre obtenu par
le meurtre, l'enfermement ou l'exil, et qui soutenait le régime qui lui
apportait l'opulence économique.
Vous pensez que l'Etat français agit différemment? Ou est-ce simplement
parce que vous vivez dans la zone protégée et privilégiée qu'il a
ménagée pour vous? À la périphérie, dans les marges, dans les failles de
l'ordre existant, la violence est bien là: aux frontières, dans les
colonies, dans les prisons et les CRA, lorsque les flics éborgnent ou
assassinent, dans le patriarcat et la culture du féminicide et du viol,
dans la répression de la dissidence de genre, dans le racisme et
l'islamophobie institutionnalisés... Sans oublier qu'aux portes de
l'Europe, Frontex tue impunément. Il faut un sacré degré de contentement
moral et de satiété consumériste pour penser que la violence a disparu.
Elle est là, en permanence, activée plus ou moins discrètement contre
celles et ceux que l'État identifie comme ses ennemis.
Mais ça, nous militant.e.s, nous le savons! Nous ne sommes pas aveugles,
nous connaissons la réalité de la violence qui fonde et qui consolide
les institutions. Nous savons que le fascisme - si l'on accepte de
donner ce nom à cette violence d'Etat - n'a jamais tout à fait disparu,
qu'il s'est retiré du centre, où les citoyens les plus dociles
détournent le regard, mais qu'il continue à s'exercer au quotidien sur
les ennemis du système libéral-capitaliste. Nous savons que cet État-là,
le nôtre, est l'un des plus violents et des plus cruels qui soit, parce
qu'il a atteint un degré de contrôle des populations, de surveillance,
d'endoctrinement, de propagande et de puissance répressive - pensez à
l'armement actuel des CRS et de la BRAV-M - inégalé dans l'histoire.
Sous couvert de quelques libertés, les citoyens des prétendues
démocraties contemporaines sont sans doute parmi les plus surveillés,
contrôlés, déshumanisés et asservis que l'humanité ait connue, sans
échappatoire possible puisque le marché et les caméras couvrent tout,
tandis que les techniques d'intimidation et d'élimination de la
contestation ont atteint un degré de sophistication ahurissant.
Le prix de votre confort
Mais peut-être estimez-vous qu'on vit tout de même mieux en France
aujourd'hui que dans une dictature, qu'il ne faut pas exagérer ni
dramatiser la situation et que nous aurions beaucoup à perdre d'une
inflexion réactionnaire l'ordre républicain. Mais alors qu'entendez-vous
par «vivre mieux», et qu'avons-nous à perdre de si précieux? Votre
confort consumériste et tous vos droits libéraux méritent-ils donc
d'être protégés et choyés? Vos petits accommodements avec l'Etat
libéral-capitaliste vous auraient-ils rendu aveugles à l'extraordinaire
impuissance qui est la vôtre, à la privation totale de véritable liberté
que vous subissez, à votre avilissement, à la soumission qui vous est
imposée et à la déshumanisation marchande qui vous aliène et qui
imprègne chaque chose et chaque personne que vous croisez? Quel degré
d'embourgeoisement faut-il pour se satisfaire d'une telle existence? Et
comment peut-on oublier que chaque seconde de tranquillité dont vous
jouissez est payé au prix du sang dans les marges de la société? Vous
n'êtes pas traqué.e.s au quotidien ni menacé.e.s par le pouvoir? Pendant
que vous survivez, d'autres le sont, d'autres meurent dans les prisons
ou assassinés.
Oui, pour nous tous les États se valent. Et penser que le nôtre,
aujourd'hui, paré des atours du républicanisme, est somme toute un lieu
où il fait bon vivre, revient à cracher à la figure de toutes les
personnes que la république martyrise au quotidien, sur son territoire
et dans les colonies. C'est se complaire à résider, comme disait Debord,
«au centre tranquille du malheur», environné de «désolation et
d'épouvante». C'est renoncer à tout espoir d'autonomie, à toute capacité
d'agir en vue d'un mode d'existence différent de la petite satisfaction
matérielle et juridique qu'on daigne nous accorder en échange de notre
silence.
Dans ce cadre, que peut bien nous faire la prétendue «menace» de
l'arrivée au pouvoir d'un énième parti gestionnaire de l'ordre existant,
simple expression de la frange réactionnaire du capitalisme qui trépigne
d'impatience en attendant de pouvoir utiliser la violence étatique au
profit de ses intérêts sectoriels? Rien.
Nous combattons l'État sous toutes ses incarnations et nous n'avons que
faire des micro-particularités qui peuvent affecter la répartition des
postes internes à sa forme républicaine du moment. Nous le combattions
avant, nous luttions déjà aux côtés des exploité.e.s et des opprimé.e.s,
et nous continuerons. La violence était déjà là avant, et elle est
encore là aujourd'hui. L'été dernier, à l'échelle de l'État français, il
ne s'est rien passé et il ne pouvait rien se passer.
Et c'est normal: le propre du système libéral-capitaliste est qu'il ne
s'y passe jamais rien. L'impuissance politique des individus est le
critère fondamental qui lui permet de se perpétuer. Croire qu'on peut y
vivre en paix, c'est déjà signaler son renoncement. Croire à ses belles
fables - qu'il est le régime le plus ouvert, le plus libre, le plus
accueillant - c'est démontrer son propre degré de capitulation. Nous,
militant.e.s insurrectionnalistes, nous n'y croyons pas. Pas plus que
nous ne croyons aux belles nomenclatures philosophiques qui classent les
États à partir de leurs petites variations idéologiques et de leurs
péripéties institutionnelles. Notre force, au contraire, est une force
simplificatrice, qui ne perd pas de vue que dans la lutte contre la
domination, là où il n'y a que deux camps en présence, ces nuances sont
illusoires.
Et maintenant?
Nous savons que nos camarades les plus lucides ont fait le même constat
de leur côté, et nous savons que nous les retrouverons dans les luttes.
Mais où sont-iels, celles et ceux qui nous disaient qu'une défaite de
l'extrême-droite allait permettre de mieux s'organiser et se mobiliser?
Iels nous ont asséné cet argument jusqu'à plus soif, comme si la
révolution était imminente et qu'il suffisait de quelques semaines ou de
quelques mois de «répit» (comme l'a dit l'UCL dans un piteux communiqué
appelant à voter) pour qu'elle soit enfin lancée... Où sont-iels
tous.tes passées? Nous sommes à l'automne 2024, et il n'y a plus
personne. On se compte, comme d'habitude, sur les doigts de la main sur
le terrain, dans les luttes et dans les cortèges de tête, et seuls
quelques noyaux de résistance tels que les camarades de l'AG Antifa
Paname - qu'on salue au passage - surnagent dans le marasme ambiant.
C'est le même marasme que l'an passé, avant la fièvre électoraliste.
Rien n'a changé. Les anarchistes et les révolutionnaires de salon qui
appelaient à voter, ou qui nous faisaient la morale, simples
rabatteur.ses de la gauche parlementaire, ont à nouveau disparu et se
sont tus. Pendant ce temps, la violence d'Etat continue.
Avec le recul qui est le nôtre, nous connaissons bien le caractère
cyclique du naufrage électoraliste auquel nous avons assisté: ce fut le
cas à chaque fois que la gauche arriva au pouvoir, ou à chaque fois
qu'il a fallu supporter le chantage au vote utile contre
l'extrême-droite. Il est sans doute écrit quelque part que chaque
génération de militant.e.s révolutionnaires connait son lot de
renoncements et de trahisons. À chaque fois, des gens que l'on
considérait comme des camarades se résignent à être étatisés, à n'être
plus que des figurants indistincts à l'intérieur du régime, à cogérer
leur propre asservissement en échange de quelques miettes de confort
matériel et d'assimilation libérale. À chaque fois, iels brisent la
solidarité dans la lutte qui constitue le communisme en actes. Comme
nous l'écrivions déjà dans Le Citoyennisme qui vient, ce n'est pas si
dramatique: après tout, cela nous permet, à chaque fois, de mieux
distinguer nos amis de nos ennemis.»
Des insurrectionnalistes
(*) Voici les deux arguments que nous avons reçus de la part d'un seul
modo à propos de ce texte, sans possibilité de répondre ni de discuter:
" il relativise complètement le danger de l'extrême droite au pouvoir
(par exemple «De notre point de vue, c'est le calme plat», ou alors «il
n'y a aucune différence entre les types de régimes qui fonctionnent avec
et pour l'État» - il y a quelques différences notables). "
" qu'il appelle à ne pas voter/participer à l'État par l'élection ok,
mais il attaque les camarades qui vont voter, jusqu'à les rendre
responsables de la légitimité de l'État («Toute personne qui vote se met
au service de l'État et consent à soutenir sa logique d'oppression») "
SOURCE: Joie et tension
https://www.socialisme-libertaire.fr/2025/02/anarchistes-et-urnes-trahison-ou-simple-soumission.html
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