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(fr) Alternative Libertaire #359 (UCL) - Éducation: Au-delà de Bétharram, abolir l'enseignement privé

Date Wed, 9 Apr 2025 17:22:15 +0100


Bayrou et Bétharram, Oudéa-Castéra et Stanislas: les affaires se suivent et font ressortir la solidarité infaillible des bourgeois pour l'enseignement privé, théâtre de toutes les violences et sangsue de l'argent public. Il est grand temps de revenir à ce qui fut à une époque une revendication large à gauche: l'abolition de l'enseignement privé. ---- Plus de 112plaintes, et des faits qui durent depuis les années 70. Pendant plus d'un demi-siècle, le collège Notre-Dame de Bétharram a été le lieu de violences physiques, psychologiques et sexuelles. Humiliations, blessures graves, viols et agressions sexuelles: la liste est interminable et révèle une institution entière dédiée à brutaliser ses élèves. Une réalité connue, et couverte par tout le monde: le corps enseignant et les parents d'abord, mais également les responsables politiques. Les enquêtes de Mediapart ces derniers mois ne permettent pas de douter: Bayrou savait. Il n'a rien dit. Il n'a rien fait[1].

Des nouvelles de «l'École libre»

Mais derrière Bétharram et la responsabilité individuelle du Premier ministre il y a un système bien plus large, celui de l'enseignement privé religieux. En France, c'est en particulier l'enseignement catholique qui représente l'écrasante majorité des établissements privés. Voilà une véritable institution dédiée au séparatisme, au vrai: celui des riches. Et un système que la bourgeoisie défend bec et ongles de longue date.

Plusieurs décennies avant la Manif pour tous, c'était pour défendre l'enseignement privé religieux que les droites s'étaient rassemblées dans la rue, au sein du «mouvement de l'École libre» en 1984. Le mouvement s'opposait au projet de loi Savary visant à unifier le système éducatif français, projet perçu par les conservateurs comme attaquant l'enseignement privé. La mobilisation est massive: à son apogée plus d'un million de personnes manifestent à Paris, rassemblant des militant·es allant du centre à l'extrême droite, venu·es en cars de toute la France. Le mouvement sera victorieux, et mènera même à la chute du gouvernement. Une mobilisation qui a depuis effacé chez la gauche parlementaire toute velléité de s'attaquer à l'enseignement privé.

Il y aurait pourtant beaucoup à dire et à faire. Depuis la mise en lumière de l'affaire Bétharram les témoignages affluent sur les violences physiques, psychologiques et sexuelles qui ont lieu dans de nombreux autres établissements catholiques[2]. Le résultat d'une vision des enfants comme des créatures qu'il faudrait dresser, plutôt que comme des personnes à instruire et à construire, et d'une culture de la domination qui trouve dans l'école son creuset: un espace où imprégner dès l'enfance la violence et la soumission. L'enseignement catholique français est historiquement marqué par des branches particulièrement rigoristes de l'Église, notamment les Jésuites et les Lasalliens, prônant l'obéissance et un respect absolu de l'autorité. Une vision qui s'accorde très bien aux valeurs de la bourgeoisie conservatrice qui a toujours normalisée les violences «éducatives». Déjà en 2002, c'était le même Bayrou qui, en pleine campagne présidentielle, giflait un enfant inconnu, avant de se défendre en disant avoir réagi «en père de famille». Le patriarcat n'est jamais loin.

Gavés d'argent public

Le soutien des conservateurs à l'enseignement privé se traduit aussi de façon très matérielle, à grand renfort d'argent public. Outre les soutiens dont bénéficient déjà contractuellement les établissements privés sous contrat (97% des cas), ils reçoivent aussi de larges «bonus» sous la forme de subventions «facultatives» versées par les institutions de l'État. Mediapart a ainsi documenté l'année passée qu'entre 2016 et 2023 les régions métropolitaines ont versé 1,2milliards de subventions facultatives aux seuls lycées privés[3]. Bétharram fait parti des heureux élus, recevant un «bonus» de 142 000 euros par an depuis 2016. L'établissement parisien ultra-conservateur Stanislas à Paris a aussi bénéficié de ces largeurs: il a reçu plus de 1,5millions d'euros de «subventions facultatives» sur la même période, malgré un rapport de l'inspection générale de l'éducation nationale pointant ses dérives sexistes et homophobes. Il faut dire qu'avec seulement sept gymnases et deux piscines, l'établissement a bien besoin d'aide... La bourgeoisie parisienne a le sens des priorités, pendant que les élèves du 93 continuent de faire cours dans des conditions absolument inacceptables.

Le choix de la ségrégation scolaire

L'enseignement privé tel qu'il existe en France est un véritable choix politique, celui d'une école à deux vitesses: l'une ouverte à tous·tes, et l'autre à péage. Près de 17% des élèves les plus privilégiés peuvent s'y retrouver entre eux, en profitant des mêmes financements que le public, mais en y ajoutant l'argent des frais d'inscription des établissements ainsi que des financements privés ou du mécénat. Un système français dont la générosité est unique dans l'OCDE pour les établissements privés, qui affichent les prix les plus abordables d'Europe. Cela leur permet d'être assez compétitifs pour ne pas être réservés qu'à une élite d'ultra-riches, et de se présenter comme une alternative à la partie la plus aisée de la population qui cherche à extraire ses enfants d'un enseignement public de plus en plus sous-financé. À Paris, sans initiative politique, l'enseignement privé pourrait même devenir majoritaire dans la décennie à venir[4].

Ces dernières années, l'enseignement privé a aussi été le théâtre d'un deux poids deux mesures spectaculaire, l'État s'étant attaqué de façon acharnée aux établissements musulmans. En janvier, le lycée Al-Kindi de Lyon a ainsi perdu son contrat avec l'État, après avoir subi quatre inspections en un an. À titre de comparaison, sur la même période les 7 500 lycées catholiques ont été, en tout, visités cinq fois par l'État. Et les 112plaintes de Bétharram, se cumulant depuis des années, n'ont jamais remis en question les financements publics de l'établissement. Al-Kindi était le dernier lycée musulman sous contrat en France, après la résiliation du contrat du lycée Averroès de Lille l'année dernière[5]. Comme quoi, l'État sait très bien fermer des établissements privés quand il le souhaite, il s'agirait simplement qu'il apprenne à le faire pour d'autres raisons que son agenda islamophobe.

Mettre fin aux financement des établissements privés ne mettra pas magiquement fin aux violences, qui existent aussi dans les établissements publics, et n'effacera pas toute ségrégation sociale: certains des bastions les plus élitistes du pays sont des établissements publics, comme le lycée Henri IV à Paris. Mais cela aura au moins un mérite: rendre l'argent public aux établissements publics. Pas un centime ne devrait aller à Bétharram ou Stanislas quand des élèves de Saint-Denis font cours sans chauffage en hiver.

N. Bartosek (UCL Alsace)

Notes:
[1]« Bayrou, roi du silence », Alternative libertaire, mars 2025.
[2]Voir « Dans le sillage de l'affaire de Bétharram, la libération de la parole lève le voile sur l'ampleur des violences passées dans des établissements catholiques » par Eléa Pommiers et Philippe Gagnebet, Le Monde, 11 mars 2025, et « L'affaire Bétharram fait tache d'huile dans d'autres internats catholiques » par David Perrotin et Antton Rouget, Mediapart, 4 mars 2025.
[3]« Lycées privés: révélations sur une rallonge de 1,2 milliard d'euros d'argent public », Mediapart, 26 aout 2024.
[4]Mathilde Goanec, « Julien Grenet: « L'école privée sera majoritaire à Paris dans dix ans » » Mediapart, 7 février 2024.
[5]Matthieu Slisse, « Lycée musulman Averroès: révélations sur le coup de force du préfet » ; Mediacités, 23 janvier 2024.

https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Education-Au-dela-de-Betharram-abolir-l-enseignement-prive
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