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(fr) Alternative Libertaire #353 (UCL) - Viols de Mazan: L'affaire Pélicot, pas tous les hommes?

Date Tue, 15 Oct 2024 21:00:32 -0400


Il y a quelques semaines a commencé le «procès des viols de Mazan»: très médiatisée, cette affaire qui fait froid dans le dos est présentée comme extraordinaire, hors-norme. Pourtant, le grand nombre d'agresseurs et leur apparente banalité interpellent en venant à l'encontre de notre représentation du violeur comme un monstre isolé et facilement identifiable. ---- Pendant dix ans, de 2011 à 2020, Dominique Pélicot a drogué sa femme Gisèle à de multiples reprises dans leur domicile à Mazan et l'a donnée à violer, inconsciente, à plus de 80 hommes trouvés via un site internet. Ces hommes d'apparence ordinaire l'ont parfois violée à plusieurs reprises. Ce sont cinquante-et-un d'entre eux qui sont jugés depuis début septembre. Certains d'entre eux prétextent avoir cru participer aux fantasmes d'un couple échangiste. Cela peine à convaincre au vu des règles qui leur étaient imposées par Dominique Pélicot: pas de parfum, pas d'odeur de tabac, être propre: aucune trace pour qu'elle ne sache rien. Et de plus, le salon internet où se préparaient les viols s'appelait «À son insu». Pour d'autres, le mari était OK, donc c'était OK. Une femme appartient à son mari, elle est sa chose. Le droit de propriété prime sur les droits d'une femme! C'est ça le patriarcat. C'est ça la culture du viol.

Pendant dix ans, les médecins n'ont pas cherché ce qu'il se passait, alors que la victime a consulté à maintes reprises, était confuse et perturbée. Ils ont fini par parler d'Alzheimer. Les biais sexistes de la médecine envers les femmes n'ont certainement pas aidé à une prise en charge correcte. Quant à la sécu prompte à traquer les arrêts maladie «de complaisance», elle n'a rien trouvé à redire aux multiples prescriptions de médicaments, faites au mari, pour droguer son épouse. De même, le médecin de Dominique Pélicot n'a pas rechigné à rédiger ces ordonnances.

Le courage des femmes

Les faits ont été découverts par hasard. Coincé par les vigiles d'un centre commercial où il filmait «sous les jupes des filles» Pélicot a vu son ordinateur inspecté par la police. Et les multiples photos des viols ont été trouvées. Avec aussi des photos de la fille du couple, nue. Après plusieurs décennies de vie de famille et de couple, ces deux femmes apprennent ainsi que leur mari et père a fomenté ces crimes atroces alors qu'elles le percevaient comme «un bon mari».

Gisèle Pélicot, avec grand courage, a refusé le huis-clos pour que tout le monde sache: il faut que la honte change de camp. Dès les premiers jours du procès prévu pour durer plusieurs semaines, les différentes stratégies employées par la défense suscitent l'indignation collective à de multiples reprises et révèlent à quel point la culture du viol est ancrée dans les moeurs. Le 10 septembre, Guillaume de Palma, avocat de la défense, estime «qu'il y a viol et viol et, sans intention de le commettre, il n'y a pas viol».

Ainsi selon lui, peu importe que la victime ne soit pas consentante, la qualification de viol dépendrait des intentions supposées de ­l'agresseur! Une autre avocate de la défense, Nadia El Bouroumi, se montre particulièrement insistante par ses questions à Gisèle Pélicot et provoque la colère de celle-ci. L'avocate se justifie: «Moi, j'ai pris le micro en disant que c'était elle qui avait souhaité que ce soit public et que maintenant il ne s'agissait pas de se plaindre». Combien de temps encore les victimes de violences sexistes et sexuelles (VSS) devront-elles endurer de telles humiliations publiques?

Le continuum des violences patriarcales

Ce procès démontre l'existence de la culture du viol que nous, en tant que féministes, expliquons déjà depuis des dizaines voire des centaines d'années: les violences patriarcales sont toujours liées à un contexte général et systémique. Les idées sordides de Dominiques Pélicot ne lui sont pas apparues un matin, au réveil, d'un seul coup. C'est ce que leur fille, Caroline Darian, explique dans son livre Et j'ai cessé de t'appeler papa: dans son enfance, les indices de violences et d'emprise étaient nombreux. Son grand-père, le père de Dominique Pélicot, était marié à sa fille d'adoption, sous tutelle: Caroline Darian décrit cette relation malsaine et relève le fait qu'elle a du insister pour obtenir le droit de ne plus aller chez lui. Le climat incestueux dont elle parle n'est pas un cas isolé: les enquêtes récentes de la CIVIISE[1]nous rappellent que ce phénomène existe dans de nombreuses familles, caché la plupart du temps pendant des dizaines d'années. Lorsque les victimes parlent elles ne sont crues ni par leur famille, ni par les flics, ni par la justice.

Ce système patriarcal a conduit à ce qu'aucun homme contacté par Dominique Pelicot sur le forum où il recrutait les futurs agresseurs ne donne l'alerte, ne se préoccupe du destin de Gisèle Pelicot. L'emprise du mari sur sa femme a mis plusieurs années à se refermer sur elle, et à toutes ces étapes des personnes de l'entourage auraient pu se saisir des indices pour intervenir et faire cesser ces actes atroces. Pour que des violences patriarcales s'installent, il faut que de nombreuses personnes ferment les yeux. Arrêtons donc de les fermer et crions haut et fort: vous n'aurez plus jamais le confort de nos silences!

Aujoud'hui Caroline Darian milite pour la reconnaissance et la prévention de la soumission chimique. Ce phénomène doit être traité de manière urgente et radicale, pour que cessent ces violences et notamment pour qu'enfin nous puissions toutes aller en soirée sans constamment vérifier nos verres et douter de leurs contenus.

Soutien à toutes les victimes de viols

Des rassemblements et manifestations ont eu lieu dans 40 villes différentes en France le 14 septembre suite à un appel national: elles ont été saluées par Gisèle Pélicot elle-même, lors d'une interview médiatique. Ces mobilisations ont été l'occasion de prendre la parole pour visibiliser l'ampleur des enjeux politiques, de couvrir les rues de pancartes magnifiques et inventives, de se retrouver et de se serrer les coudes. À Rennes, 600 personnes se sont rassemblées; le micro a été mis à disposition et de nombreuses victimes de VSS et d'inceste sont venues témoigner pour montrer à quel point ces violences ne sont pas isolées. Nous ne sommes pas seules, mais nombreuses, déterminées, et ensemble nous détruirons ce système mortifère qui ruine nos vies.

Christine (UCL Sarthe)

Noets:
[1]CIVIISE: Commission Indépendante sur l'Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants.

https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Viols-de-Mazan-L-affaire-Pelicot-pas-tous-les-hommes
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